Méthodologie et sciences humaines

Ici, nous proposons au visiteur quelques références sur la méthodologie en sciences humaines. Cette question est pour nous centrale. Elle permet de discuter de notre légitimité d’anthropologue à jouer avec les autres savants au jeu de la vérité et de la connaissance. Il est particulièrement intéressant de ne pas craindre cet exercice de justification notamment pour échanger avec les professionnels de la santé. Nous leur montrerons qu’il y a d’autres obsessions possibles que celle du « petit p », comme par exemple celle du « petit r » de la réflexivité. Donc oui, il y a une méthodologie en sciences humaines. Attachez vos ceintures, le voyage décoiffe !

 

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ANDRIEU Bernard (2011). Le corps du chercheur, une méthode immersive.

« La validité d’une production scientifique, son objectivité, voire son universalité, apparaissent chez certains épistémologues de l’esprit comme proportionnelle à son degré de désincarnation » (p. 15). Nous avons beaucoup aimé ce livre de Bernard ANDRIEU, dans lequel il aborde la réflexivité par l’inscription corporelle du chercheur et dynamise ainsi l’épistémologie des sciences du corps, du sport en ce qui le concerne, et du soin en ce qui nous concerne.

ANDRIEU Bernard (2011). Le corps du chercheur, une méthode immersive. Nancy : Presses Universitaires de Nancy, 176 p.

DEVEREUX Georges (1967). De l’angoisse à la méthode.

Attention, ce livre est un grand livre. À lire absolument ! Georges DEVEUREUX, figure de la psychanalyse et de l’anthropologie nous autorise à reconnaître le chevauchement entre le sujet d’étude et l’observateur. Après sa lecture, on ne craint plus de dire que le savant doit chercher à se comprendre lui-même en tant qu’observateur s’il veut gagner en réalité. C’est un message fort sur lequel milite Let-Know Café.

DEVEREUX, George (1967). De l’angoisse à la méthode, dans les sciences du comportement. Paris : Aubier, 474 p.

FASSIN Didier (2009). Une science sociale critique peut-elle être utile ?

Didier Fassin aborde ici la question de l’utilité de l’anthropologie avec beaucoup de talent. Il présente dans un premier temps une réflexion sur la dimension critique des sciences humaines. Il utilise la métaphore de la caverne. Certains penseurs critiques se penseraient dans une radicalité hautaine, à l’extérieur de la caverne, dans l’ambition d’éclairer ceux de l’intérieur et de rectifier leur ignorance. D’autres à l’inverse se penseraient dans la caverne, dans une compréhension complaisante de leurs congénères, avec qui ils partageraient les vicissitudes et les incertitudes, produisant des vérités relatives et contingentes. Fassin propose une troisième voie, ni en dedans ni au-dehors de la caverne, mais bien, de fait, sur le seuil. L’auteur se prononce en fin d’article sur sa vision de l’utilité sociale des sciences sociales. Fassin dans son art, simple, efficace… On adhère +++.

FASSIN Didier (2009). Une science sociale critique peut-elle être utile ? Tracés. Revue de Sciences humaines. Hors-série. pp. 199-211.

FASSIN Didier, BENSA Alban (2008). Les politiques de l’enquête.

Didier FASSIN et Alban BENSA, tous deux directeurs d’Études à l’EHESS, coordonnent cet ouvrage collectif. Ils invitent les contributeurs à s’interroger sur la façon dont le genre, les préjugés, les émotions de l’anthropologue, influent sur la compréhension qu’il peut avoir de la société qu’il étudie. Ce livre plaide ainsi pour une manière réflexive et critique de répondre de sa recherche. Il rejoint là l’objectif scientifique de Let-Know Café.

FASSIN, Didier, BENSA, Alban (s. dir.) (2008). Les politiques de l’enquête. Épreuves ethnographiques. Paris : La Découverte (Bibliothèque de l’Iris), 331 p. 

KESSLER-BILTHAUER Déborah (2014). Enquêter sur le soin ou l’engagement personnel du chercheur.

Cet article est intéressant, car il montre les questionnements d’une jeune chercheuse face à la méthode en sciences humaines. On sent cette oscillation entre la reconnaissance de la subjectivité à travers l’importance de la réflexivité et cette attirance irrésistible vers l’objectivité, comme un graal certes reconnu comme utopique, mais qui reste malgré tout la ligne de mire. Intéressant. Et bien dans nos questionnements.

KESSLER-BILTHAUER, Déborah (2014). Enquêter sur le soin ou l’engagement personnel du chercheur. In : PIERRE, Thomas. Autour du soin. Pratiques, représentation, épistémologie. Nancy : Presses universitaires de Nancy, pp. 71-84

LAPLANTINE François (2006). La description ethnographique.

Si nous devions ne recommander qu’un seul ouvrage sur la méthodologie, c’est celui-ci que nous citerions. Loin des gros pavés, ce petit livre de la collection 128 traduit la finesse épistémologique de François LAPLANTINE. Il explique simplement en quoi consiste la transformation du regard de l’anthropologue en langage, qui prend forme aussi dans les livres, comme ceux proposés ici. Nous devrions tous avoir ce petit bouquin sur notre bureau pour pouvoir collaborer plus facilement ! 

LAPLANTINE, François (2006). La description ethnographique. Paris : Armand Colin, 128 p.

LESERVOISIER Olivier, VIDAL Laurent (2007). L’anthropologie face à ses objets.

Voilà un ouvrage collectif qui a une bonne intention : celle de faire en sorte que l’anthropologie retourne le miroir pour se regarder elle-même et analyser l’état actuel de ses pratiques. Le résultat est intéressant. La réflexivité qui nous est chère y est plusieurs fois abordée, toujours un peu timidement, mais quand même…

LESERVOISIER, Olivier, VIDAL, Laurent (2007). L’anthropologie face à ses objets. Nouveaux contextes ethnographiques. Paris : Éditions des archives contemporaines, p. 295.

MESNIER Pierre-Marie, MISSOTTE Philippe (2003). La recherche-action.

Ce livre nous a passionnés il y a quelques années, au début de nos études d’anthropologie. Nous avions alors créé l’association Epi-Ethno Santé, sur ce principe de la recherche-action, où la recherche nourrit l’action et l’action nourrit la recherche, dans une co-construction. Tout cela nous paraît aujourd’hui toujours très pertinent. Il est tellement évident que la recherche et l’action sont dans un lien réflexif indéfectible, que finalement par souci de simplification, autant appeler « recherche » la « recherche-action ». 

MESNIER, Pierre-Marie, MISSOTTE, Philippe (2003). La recherche-action : une autre manière de chercher, se former, transformer. Paris : L’Harmattan, 325 p.

OLIVIER de SARDAN Jean-Pierre (2008). La rigueur du qualitatif.

Jean-Pierre OLIVIER de SARDAN est professeur d’anthropologie à l’EHESS. Il se risque dans cet ouvrage à proposer un livre systématisé sur la méthodologie en anthropologie et les contraintes empiriques des interprétations du chercheur anthropologue. Le résultat est assez réussi, déjà par son titre. Sans voir ce livre comme une référence qui enfermerait, nous avons là un excellent guide pour l’anthropologue en herbe.

OLIVIER DE SARDAN, Jean-Pierre (2008). La rigueur du qualitatif. Les contraintes empiriques de l’interprétation socio-anthropologique. Louvain-la-Neuve : Bruylant-Academia, 365 p.

PIETTE Albert (2014). Contre le relationnisme. Lettre aux anthropologues.

Albert Piette, dans son ouvrage, met en garde les anthropologues contre le danger d’une connaissance du général au détriment du singulier. Pour l’auteur, l’enjeu du travail de refondation de l’anthropologie est de revenir à l’individu singulier et à sa primauté sans perdre les acquis de la critique des philosophies du sujet, remises en cause au nom de collectifs dépassant les individus. On aime bien l’idée soutenue dans ce livre, que par l’attention portée aux détails, nous apprendrions à respecter et aimer la singularité de chacun. L’anthropologie comme un vrai projet humaniste ? Un projet où nous n’aurions plus de peine à nous soucier de ces singularités des autres, vulnérables et minuscules.

PIETTE Albert (2014). Contre le relationnisme. Lettre aux anthropologues. Lormont : Le Bord de l’eau, 96 p.